Dirigeante de l’agence strasbourgeoise Joli Rouge, Delphine Magisson analyse la situation actuelle et anticipe la communication de demain. Pour elle, les marques devront, plus que jamais, se révéler utiles.
– Comment Joli Rouge s’est organisée depuis le début du confinement ?
– Le vendredi avant le confinement, avant que le sujet ne devienne officiel, j’ai proposé à mon équipe de passer en télétravail. Dès le lundi matin, chacune est venue (en ce moment l’équipe est entièrement féminine) prendre son ordinateur, ses dossiers et, très important chez nous, ses stylos.
Dès la 2ème semaine, j’ai démarré ma réunion d’équipe en expliquant que ce nouveau format allait être désormais notre nouvelle normalité. J’ai donc repensé l’organisation en mode virtuose pour délaisser le mode Bob le Bricoleur.
Les semaines passant, j’ai aussi pu réfléchir à ce qu’il me manque dans le télétravail pour être parfaitement pertinentes et j’ai identifié deux choses : tout ce qu’on peut se dire avec l’équipe ou les clients dans les moments informels, et tout ce qui se joue dans l’immédiateté de la réflexion collective.
Aujourd’hui je prépare déjà le retour à l’agence. Je viens de finaliser notamment un protocole d’hygiène individuelle et collective à appliquer au bureau. Parce que pour le reste, on retrouvera très vite nos marques.
– Vos clients sont-ils actifs ? Quelle communication privilégient-ils dans cette période ?
– Côté clients, tout est allé très vite également. Quelques dossiers ont été immédiatement reportés, toujours pour de très bonnes raisons, donc pas de frustration de ce côté-là. Et sur d’autres dossiers, nous avons pu travailler en mode TGV, parce que les clients étaient très disponibles pour avancer sur les questions de discours et d’identité de marque. D’autres dossiers sont rentrés et ça était très rassurant.
Aujourd’hui, j’ai l’impression qu’on est dans une autre phase. Nos clients préparent le maintenant et l’après. Beaucoup de nouveaux sujets émergent et c’est très riche intellectuellement. On a l’impérieuse nécessité de réfléchir rapidement parce que pour certains sujets, dans 15 jours ce sera trop tard. Tout va très vite, les décisions, les validations, la mise en œuvre. Et ce n’est pas pour me déplaire !
Du côté de l’agence, nous avons aussi identifié des signaux faibles qui sont des opportunités de communication pour des marchés ou des secteurs et on bosse dessus.
– En quoi cette période changera-t-elle la communication des marques et comment Joli Rouge a-t-elle prévu de s’adapter ?
– Depuis toujours chaque projet qui rentre à l’agence est vu sous le prisme de l’utile. On se pose à chaque fois deux questions. La communication que me demande mon client est-elle utile ? La proposition qu’on lui fait est-elle, en tous points (axe stratégique, choix des supports, plan média) utile pour lui et pour ses clients ? J’ai l’impression que ce prisme va devenir important pour toutes les marques. J’ai l’impression que ce temps d’arrêt permet aux clients de réfléchir à leur entreprise et à ce qu’elle peut raconter d’utile à leurs clients.
J’espère aussi que les annonceurs, notamment institutionnels, auront remarqué à quel point les agences sont hyper réactives et savent apporter des réponses rapides et rendre opérationnelle leur communication en un temps record.
Comment Joli Rouge a-t-elle prévu de s’adapter ? J’ai l’impression d’être dans l’adaptation constante, de porter avec l’équipe une réflexion permanente sur la pertinence de ce qu’on fait et de comment on le fait. Ça ne va pas beaucoup changer.